Il m’est arrivé de lire, glanés sur le net, des mémoires très intéressants rédigés par des étudiants en science de l’éducation, ou futurs enseignants. J’y ai cependant plusieurs fois trouvé la même erreur, et comme ces étudiants sont très sérieux, ils citent leur sources, qui, évidemment concernant Grosselin, étaient les mêmes.
Je me suis donc procuré deux de ces « sources »:
- la première : « Enseignement et maitres d’hier : apprendre à lire » de Joseph Maréchal – Éditions Bellier – 1998
Ce Monsieur Maréchal ayant été Inspecteur de l’enseignement primaire à Lyon, on peut comprendre que ses écrits fassent autorité. Cela prouve que lorsque qu’on publie des infos, il vaut mieux les avoir vérifiées, sinon des idées fausses circulent pendant des années! Mais c’est un autre sujet!
Monsieur Maréchal se donne comme objectif de présenter comment les « anciens » ont tenté de répondre à cette question : nos anciens ont-ils été confronté aux mêmes difficultés que nos instituteurs pour apprendre à lire aux enfants?
Il présente de manière intéressante un certain nombre de méthodes. Il présente Grosselin en 4 pages, en fin d’ouvrage. Il faut reconnaitre qu’il n’a pas poussé très loin sa recherche sur le sujet, et n’a sûrement pas lu la biographie de Grosselin !
« (Sa méthode) convient à des enfants malades et arriérés recueillis dans des hospices et dont l’intelligence affaiblie a besoin, plus que chez d’autres, de pouvoir saisir les choses par leur côté matériel et de recevoir un enseignement où l’action corporelle vienne soutenir l’effort de l’esprit. Puis la méthode fut introduite, avec succès, dans les salles d’asile, les écoles primaires,les classes d’adultes ».
Il résume ensuite brièvement les principes de Grosselin, puis termine son chapitre par ces mots:
« La méthode de Grosselin -sténographe de son état- était conçue au départ pour des sourds-muets. »
Le biographe de Grosselin, en 1870, écrit exactement le contraire:
« Une chose assez étrange, mais qui m’a été plusieurs fois attestée par lui-même, c’est qu’en composant son alphabet gesticulé, Monsieur Grosselin n’avait en vue que les enfants entendants » page 45. (1)
- La deuxième : Monsieur Luc Maisonneuve, « Apprentissage de la lecture, méthodes et manuels », Éditions l’Harmattan, 2002.
Ce formateur de Lettres à l’IUFM de Bretagne contribue largement lui-aussi à propager l’erreur : « la méthode gestuelle est née au XIXè siècle (ça c’est vrai!) dans les hospices pour enfants malades ou arriérés », page 300.
Chronologiquement, on peut penser que Monsieur Maisonneuve a simplement transcrit ce qu’il a trouvé dans le livre du premier – il cite exactement le même extrait- ! Personne n’a lu la biographie d’Augustin Grosselin, qui présente le génie et la passion de cet homme pour l’éducation.
J’invite donc les étudiants travaillant sur l’apprentissage de la lecture, s’ils veulent parler de Augustin Grosselin, de lire sa biographie, qui est maintenant aisée à trouver puisqu’elle a été rééditée par la BNF (Bibliothèque nationale de France).
(1) Version d’origine et ré-impression :